Loi sur l'eau et Directive européenne : "une mini
révolution"
INFORMATION-EAUX de 07-08/2001 reprend les grands axes
du projet de loi présenté en conseil des ministres,
le 27 juin : "Garantir le droit de chacun d'accéder
à l'eau potable pour satisfaire ses besoins vitaux (…)
avec pour objectif de renforcer la transparence, la
démocratie et la solidarité dans le service public de
l'eau et de l'assainissement ; améliorer l'efficacité
environnementale ; renforcer le rôle du Parlement ;
développer l'intervention des collectivités territoriales
(…) afin d'améliorer la gestion décentralisée de la
politique de l'eau ; consolider la police de l'eau".
L'EAU L'INDUSTRIE LES NUISANCES de 06-07/2001 commente
ces thèmes mais rappelle que la loi transpose la directive
cadre européenne sur l'eau dans le droit français. "Ce
texte oblige les pays membres à définir des objectifs
de qualité et pas uniquement des moyens. Ce qui constitue
un grand pas en avant. Les Etats devront atteindre un
bon état écologique des eaux d'ici 15 ans. Ce qui comptera,
ce sera désormais le respect concret du milieu et non
seulement celui des textes législatifs et des procédures
administratives. Une mini-révolution".
Un déséquilibre ?
Pour le PECHEUR PROFESSIONNEL (juillet-août 2001),
"un des objectifs principaux est de rééquilibrer la
taxation entre les usagers. En effet par exemple, les
agriculteurs qui pratiquent l'irrigation captent 68
% de l'eau utilisée alors que leur quote-part ne représente
que 5 % des sommes perçues. (…) Il faut dire que les
agriculteurs reçoivent dix fois plus d'aides des agences
de l'eau qu'ils ne versent de taxes". Il ne mentionne
pas ce qui ressort fréquemment quand les agences parlent
gros sous : l'agriculture ne pèse pas grand chose dans
leur budget. INFORMATION-EAUX 07?08?09/2001 fournit
les chiffres des Agences Loire-Bretagne et Adour-Garonne
: la somme des aides versées par ces deux institutions
en 2000 s'élève à 5.9 Milliard de Francs : 85 % pour
les collectivités territoriales, 11% à l'industrie,
et 4 % à l'agriculture. Bernard Baudot, interrogé par
ENVIRONNEMENT MAGAZINE juillet-août 2001 recadre :
"Nous n'avons pas la volonté de récupérer de l'argent,
mais nous souhaitons amorcer une politique de responsabilisation
des agriculteurs et une incitation à la gestion collective
de l'eau via la mise en place des SAGE".
Les irrigants bien raisonnables.
Le député R. Garrigues s'inquiétait au cours de la
séance de l'Assemblée Nationale du 19 juin à propos
de la loi sur l'eau et notamment de la redevance sur
l'irrigation. Au nom du Ministre de l'Agriculture, le
Ministre des Relations avec le Parlement répond clairement
: "La redevance intéressant l'irrigation a été conçue
dans le souci de ne pas augmenter le montant des redevances
acquittées par ceux des irrigants qui, en 2003, se seront
engagés dans des pratiques de gestion collective et
raisonnée de la ressource à l'échelle d'un bassin ou
d'un sous-bassin hydrographique". Selon le ministre,
prés de la moitié des irrigants pratiquent déjà l'irrigation
raisonnée. LE MONDE 28/06/01 l'affirme : "Les irrigants
qui feront preuve d'un comportement vertueux, en s'associant
dans une gestion collective de la ressource, paieront
moins de redevances et seront en sus aidés financièrement
par les agences de l'eau".
Service Public, vous avez dit Public ?
Ce projet de loi est d'ailleurs loin de ne toucher
que l'agriculture. Patrick Février, dans ENVIRONNEMENT
ET TERRITOIRE 06-07/2001, rappelle d'autres changements
prévus par la loi : "les logements neufs devront
désormais être équipés de compteurs individuels", "des
redevances [seront perçues] sur les nouveaux aménagements
s'ils aggravent les risques d'inondations". ENJEUX
d'avril 2001 interroge le PDG de Lyonnaise des Eaux
France sur le fait que "les contrats de délégation
passés par les communes seront réduits de 20 à 12 ans".
"Cette disposition du projet de loi sur l'eau ne répond
pas au besoin des français" répond-il. Pourtant,
D. Richard dans SUD-OUEST 20/10/2001 titre : "Des
contrats trop longs : 2023 à Agen, 2020 à Tonneins…
La Chambre régionale des comptes s'étonne de la longévité
des contrats liant les collectivités locales aux sociétés
d'eau. Si les contraintes liées à la continuité du service
public et à la nécessité d'amortir les investissements
mis en œuvre justifient une certaine permanence du délégataire,
elles ne peuvent en aucun cas pérenniser des situations
acquises". ENJEUX précise dans son dossier que le
"Haut conseil des services publics de l'eau et de
l'assainissement qui sera mis en place (le CSA de l'eau
en quelque sorte) aidera les collectivités locales dans
leurs discussions avec les sociétés délégataires…".
Il faut dire comme le titre L'EAU L'INDUSTRIE LES NUISANCES
dans son Editorial de mai 2001 qu'un "rapport parlementaire
au vitriol sur la gestion des services de l'eau et de
l'assainissement" a été rendu public le 23 mai, qu'il
souligne que la maîtrise du service par les élus reste
à démontrer (…) et que l'information des usagers est
encore à inventer". A ce sujet, l'Association des
Maires de France a publié récemment un "GUIDE POUR
L'AFFERMAGE DE LA GESTION DE L'EAU". De plus, une
enquête de l'Institut Français de l'Environnement précise
que le prix du m3 d'eau (incluant eau potable et assainissement)
varie de 5.20 F à 20.7 F. Le prix de l'eau dans les
régies intercommunales entièrement en affermage est
44 % plus cher que celui des régies communales directes.
La loi verra-t-elle le jour ?
Cependant le JOURNAL DES MAIRES de 07-08/2001 doute
de l'adoption prochaine du projet de loi : "Ce texte
a désormais peu de chances d'être inscrit à l'ordre
du jour du parlement avant le printemps prochain, son
avenir plus lointain se trouve donc lié aux résultats
des élections" de 2002.
La profession agricole veux prouver…
Pendant ce temps, les irrigants font parler d'eux
dans la presse locale : ainsi LA PROVENCE souligne que
le "réseau des canaux légués par nos ancêtres est
aujourd'hui utile à tous. Il permet de drainer les eaux
pluviales et façonne nos paysages. Les surplus d'irrigation
rechargent en grande partie les nappes phréatiques.
Les études en cours permettront de déterminer avec précision
l'ampleur quantitative de ce phénomène" peut-on
lire au sujet d'une vaste campagne de mesures réalisées
par les ASA et la Chambre d'Agriculture 13 pour quantifier
l'eau des canaux réellement utilisée pour l'agriculture.
Le projet de loi et la qualité de l'eau
LE FIGARO 27/06/01 illustre son article "loi sur
l'eau : les pollueurs paieront" avec une tonne à
lisier en pleine action. Le journal insiste : "Premiers
utilisateurs de cette ressource naturelle dans l'Hexagone,
les agriculteurs sont aussi parmi ses premiers pollueurs".
LIBERATION 27/06/01 est centré sur "la culture
de la pollution" ajoutant que "lisiers, pesticides
et herbicides contaminent les ressources en eau"
et que les intrants sur les cultures "donnent une
agriculture qui pollue gravement". Pour LE CANARD
ENCHAINE 11/07/01, "responsables, selon la Cour des
comptes, des 2/3 de la pollution aquatique, les agriculteurs
contribueront désormais au paiement de … 5 % de la taxe
d'assainissement des eaux. Contre 1 % auparavant". Voilà
pour "les agriculteurs, principaux responsables de
la pollution des eaux de rivières et des nappes phréatiques"
le "résultat de cette interminable course d'obstacles"
se désespère l'éditorialiste de LIBERATION 27/06/01.
C'est une goutte d'eau mais "la faute, quoi qu'on
en dise aujourd'hui, a bien été collective", la
situation ayant été générée par tout un système productiviste
dont les agriculteurs ne constituent qu'un rouage, admet
bien volontiers le journaliste. Celui-ci rappelle en
conclusion que "cela n'exonère en rien les responsabilités
des dirigeants agricoles - à commencer par ceux de la
FNSEA - qui ont mené et vont continuer à mener combat
contre le projet de loi".
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